17 mars 2024

Prélèvements géologiques au Calernaum

Participants : Daniel, Jérôme et Mathieu
Excusé : François
TPST : 3h

Le but de la sortie étant de remonter un tas de cailloux d'une cavité pas vraiment choisie au hasard, quelques explications s'avéreront nécessaires avant de raconter son déroulement afin d'éviter une incompréhension bien légitime.

Tout commence par une interrogation d'un ami qui a attaqué des remontées et qui se demande où est-ce que ça va bien finir. Naïvement, j'avais pensé qu'une coupe géologique pourrait donner une réponse. Avec un positionnement et un report en surface, on obtient une différence d'altitude. Il ne reste plus qu'à ressortir la carte du BRGM et on est sensé avoir une petite idée.

Seulement quand le compte n'y est pas, on peut jeter la pierre au topographe, au géologue, voire les deux à la fois, mais on n'est pas plus avancé.

En creusant la question, on peut étudier la littérature sur le Calernaum. En y regardant de prêt, on a le haut et le bas de la coupe, mais avec un gros point d'interrogation au milieu, lié à une zone de fracturation. Et effectivement, le compte n'y est pas non-plus.

Avec un pendage de 17 degrés orienté à 15 degrés Nord, en tenant compte de la progression suivant le pendage et le contre-pendage, nos 194m de puits doivent nous donner une coupe d'environ 205m.

En partant du bas, on est sensé trouver les couches suivantes : Bajocien 50m (52m avec pendage), Bathonien 50m (52m), Callovien 40m (42m). Rajoutons encore l'Argovien 20m (21m) au bénéfice du doute. On a donc soit 146m, soit 167m. Il manque donc au moins environ 38m...

Il n'en fallait pas plus pour se prendre au jeu et partir ramasser des cailloux. La fine fleur du GSV a bien-entendu répondu présent.

François dont c'est la grande passion était tout excité. Malheureusement pour lui, un imprévu a gaché la fête. Il a dû déclarer forfait.

Nous nous retrouvons à trois, Daniel, Jérôme et moi à 9h30 au parking de l'observatoire.

En chemin, je leur fait admirer la faille qui traverse le plateau. On s'arrête aussi à la doline au bord du chemin, juste avant celle de l'entrée. Elle est à l'aplomb du bas de la galerie de l'Odyssée. On voit la fracture qui part vers le nord, juste au-dessus du réseau I.

Arrivés au trou, nous commençons par des prélèvements en extérieur. Sur un axe 15 degrés Nord : un au niveau de la piste, un en-haut de la doline et un à l'entrée. D'après la carte, la piste est dans l'Argovien et l'entrée dans le Callovien. Mais vu comment sont pointées les dolines dans ce secteur, je lui accorde une confiance toute relative. Elle a été réalisée avec les moyens des années 60 et publiée en 1970.

Dans le puits d'entrée, je cherche un changement de couche vendu à -20, aidé du quintuple décamètre tenu par Daniel en haut du puits. Mais bon, je n'ai vraiment pas l'oeil. J'arrive bredouille au départ du P18. Je fais quand-même un prélèvement à cet endroit-là.

La prochaine zone intéressante commence en haut du puits Pi. J'allais commencer un nouveau prélèvement quand Daniel entend les appels de détresse de Jérôme. Il fait donc demi-tour pour aller à son secours.

Comme j'ai compris, Jérôme avait présumé de ses forces pour rejoindre la lucarne en tirant sur les bras et il avait fini au fond de la boucle. Interdiction de rigoler.

Daniel a bien essayé de lui expliquer qu'il faudrait peut-être songer à réfléchir un peu avant, mais je suis sûr que la prochaine fois il aura oublié.

Reprenons. Je fais un prélèvement à coté des amarrages du départ, un à -8,5 où j'ai un doute, un autre au fractionnement à -12. Après, ça commence à arroser et je file en-bas alors que c'est sensé être la partie la plus intéressante. J'en prend un à droite face la parois (dos à la suite) et un au départ du puits des Météores.

Il est midi. On s'arrête là pour manger.

Jérôme préfère remonter suite à sa déconvenue.

Je continue suivi de Daniel. Il y a une arrivée d'eau dans le puits des Météores, c'est la douche. Au P7 aussi. Au puits David aussi. Je m'arrête au départ du P80 pour faire un prélèvement. Daniel pose les pieds au sol et repart aussitôt. Je ne le reverrai plus jusqu'à la sortie. Je me penche au-dessus du puits et effectivement ça résonne bien. Ce n'est pas vraiment le bon jour pour descendre...

Ce n'est pas grave, il me reste suffisamment à faire pour compléter les prélèvements manquants à la remontée : trois pour le David, le bas des Météores, un petit pendule en-haut du Pi (Très intéressant, il se passe des choses à un mètre de distance...), un dans le puits d'entrée 6m au-dessus du ressaut.

A la sortie, je retrouve mes deux compères qui sont en train de faire la sieste au soleil. C'est bizarre, il y a pourtant des gouttes qui tombent par terre. Après une étude approfondie, il semblerait que c'est en fait mon casque qui s'égoutte.

Comme j'ai été déçu de ne pas avoir trouvé le changement de couche à -20, je refais un aller-retour rapide, mais je sors tout aussi bredouille. Impossible de voir la différence sous terre avec l'argile, l'humidité et un éclairage à lumière chaude.

On terminera la sortie par un petit détour vers les petites barres au nord pour prendre une référence de Séquanien. Puis par la falaise, où on est sensé trouver du Callovien. On termine par l'entrée de la Grenouille. Mes accolytes meurent d'envie de se faire inviter à une visite.

Je ramène un beau tas de cailloux à la maison. Je vais pouvoir me casser les dents dessus. Mais c'est une autre histoire...

Mathieu

28 janv. 2024

Fondue savoyarde à la grotte de Combrières

Participants : François, Daniel, Jérôme, Marion, Mathieu, Nina, Noam, Rémi, Sacha, Vincent, Yannick

TPST : 4h30

Parmi les bonnes résolutions pour 2024, le Président avait mis en tête de liste la reprise de la traditionnelle fondue savoyarde souterraine du GSV souvent copiée, jamais égalée. La date du 28 janvier fut bloquée afin de pouvoir réunir à la fois la crème (rance) du club et le dessus du panier (percé) des initiés les plus assidus. La grotte de Combrières (aussi appelée grotte de Mons) fut choisie pour sa facilité d'accès, son infrastructure quasi-hotelière, et sa configuration propice aux ébats de jeunes enfants : ça tombait bien, il y avait trois mômes de prévus parmi les convives.

Mathieu, notre savoyard de service, avait, pour l'occasion, fait mûrir une sélection de fromages du terroir. C'est donc la voiture envahie par le délicat fumet de frometons en train d'agoniser qu'il rejoignit, en compagnie de Rémi, le reste de la fine équipe à 10h30 au carrefour de l'usine hydroélectrique de la Siagne. "Covoiturage" fut le maître-mot de l'expédition car les places de stationnement sont rares à proximité de la cavité. Le contenu de cinq véhicules fut donc transféré dans trois en entassant victuailles, réchaud, novices, casques spéléo, boissons, marmaille, bottes, spéléologues périmés, caquelon et vieillards plus ou moins cacochymes. A onze heures, le groupe se changeait sous le porche d'entrée et à onze heures trente il pénétrait la grotte. Le Président ayant fait remarqué qu'il était pratiquement l'heure de l'apéro, les grignotages furent déployés en un clin d'oeil et le gewurtztraminer de notre ami Yannick fut servi dans la foulée, le tout avec une rigueur toute militaire : au GSV on ne badine pas avec les horaires. 

La présence de mineurs excluant toute conversation déviante, il fut habilement suggéré à Nina, Noam et Sacha d'aller compter les chauve-souris à l'autre bout de la cavité afin que les adultes puissent débiter les cochonneries qui émaillent habituellement les discussions dans tout club spéléo qui se respecte. Effectivement, le temps que les gamins reviennent du fond sans avoir vu la queue d'une ombre d'un chiroptère, nous avions évoqué :

1) la technique de Yannick pour couler un bronze le matin sans en foutre partout (ben oui, il est fondeur...)
2) les différentes traductions de l'expression "anus horribilis" par notre latiniste distingué François (Vincent ayant à tort compris : "cul qui gratte")
3) l'accouplement des spéléologues de même sexe sous les latitudes tropicales (Rémi nous ayant ainsi fait part de ses souvenirs humides à Bornéo et à Madagascar)
4) l'invention fortuite de la lyophilisation par un vieillard du XIXème siècle qui, éjaculant en poudre compte tenu de son grand âge, rajoutait systématiquement de l'eau pour mieux contenter sa vieille compagne qui avait du mal à avaler (anecdote ayant attiré la compassion de notre infirmière Marion pour cette pauvre femme)

- Ça veut dire quoi "éjaculer" ? 

Oups ! Nous n'avions pas entendu Sacha (13 ans) qui était revenu subrepticement parmi nous. Dès lors plus aucune insanité ne fut proférée jusqu'à la fin du repas.

Pendant ce temps Mathieu avait lancé la cuisson de la fondue sur son butagaz de compétition, votre serviteur s'étant porté volontaire pour touiller (j'aime jouer du manche en premier).

 La recette toujours secrète de Mathieu (vin d'apremont, fromage-qui-pue et ail) fit des miracles : une fondue onctueuse et délicate dans laquelle il était impossible de perdre le moindre morceau de pain, sauf lorsqu'on s'appelle François. Notre jésuite maladroit fauta par deux fois ce qui lui valut d'être condamné à lécher les bottes sales de Mathieu et du Président . Lequel Président, magnanime et pour ne pas infliger ce spectacle à nos jeunes convives, autorisa François à les emporter chez lui pour les faire reluire à coup de langue (les bottes, pas les jeunes convives, suivez un peu, quoi...). Notre couleur de bronze Yannick ayant apporté, en alternative au pain, de divines petites patates de Caussols délicatement bouillies, cette fondue souterraine 2024 prit tout de suite une dimension métaphysique : un vrai nirvana de saveurs. Ce goinfre de Mathieu qui, en bon Savoyard, déteste gaspiller le mangement, se porta volontaire pour engloutir l'ultime bouchée de fromage qui avait approximativement la taille du poing de Nina (10 ans). D'une part cela lui fit une tête de hamster avec les joues gonflées (à Mathieu, pas à Nina) et d'autre part il batailla près de cinq minutes pour essayer d'avaler le brouet afin de ne pas perdre la face. Finalement il recracha le tout, ayant manqué de s'étouffer. Une fois les éclats de rire passés, Dada nous convia, en guise de trou normand, à aller explorer la grotte histoire de tasser le fromage au fond des estomacs.



Une demi-heure plus tard nous étions de retour à table pour attaquer LES desserts, en tête desquels le gâteau d'anniversaire de François. Daniel, perplexe : "C'était pas le premier novembre ton anniversaire ?". "Si, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire, comme disait Jésus" rétorqua Don Francesco. A Marion qui lui demandait son âge, notre théologien dévoyé répondit : 56 ans. Vincent s'étonna : "C'est bizarre, tu fais vraiment beaucoup plus vieux...". Et alors là, François se lança dans une démonstration médico-physico-mathématique absconse d'où il ressortait qu'en multipliant la longueur de son pénis en érection par le diamètre de son anus dilaté divisé par sa fréquence cardiaque, on tombait sur son âge réel : donc il avait 56 ans et pas 73. Rémi marmonna que le vieux était quand même vachement souple pour se mesurer la taille du trou de balle sans choper un torticolis. "C'est quoi une érection ?" demanda Noam (7 ans). "Tiens, mange du gâteau et arrête de poser des questions idiotes" le gronda Marion, sa mère. Bref, François finit par glavioter sur ses 73 bougies, et nous nous empifrâmes de tarte à la frangipane, de petits fours amoureusement choisis par Marion et Vincent, de galette des rois et de mandarines de Corse, le tout arrosé de Champagne. 

Pour faire passer la fondue.

C'est donc à quatre pattes (le ventre touchant presque le sol) que notre équipe de morfales sortit de la grotte aux alentours de 16 heures. Ceux qui avaient une Tesla à conduite autonome (c'est-à-dire personne) purent rentrer chez eux en roupillant au volant, les autres rentrèrent aussi chez eux en roupillant au volant. Aux dernières nouvelles chacun est arrivé à bon port.

Jérôme

(avec les photos de Yannick)


La sortie en images qui bougent :



29 déc. 2023

Des nouvelles du Craignos

Participants : Daniel, Jérôme

TPST : 0h50

Notre ami Chouca, désormais exilé à l'autre bout de la planète, m'avait contacté la semaine dernière depuis le pays des niaquoués pour me demander d'aller jeter un oeil à son trou fétiche, le Craignos, afin de voir si les installations n'auraient pas trop souffert des fortes pluies de début décembre. Ne pouvant rien lui refuser, j'ai donc convié le président Dada à sacrifier une poignée d'heures de cette avant-veille de réveillon pour enquêter.

Nous arrivons au camp de base vers 13h40 et constatons qu'à priori rien n'a été pillé ou saccagé. Le coffre électrique est intact, le président compte les petites cueillères et les verres : tout y est, même une bouteille de rosé visiblement périmée. Après nous être rapidement mis en tenue, nous pénétrons l'exurgence à 14h. Quelques blocs amenés ou déplacés par l'eau nous obligent à faire le ménage ça et là, mais la route est libre jusqu'à la salle de la dune. Au passage nous constatons la puissance de la crue qui a fait valdinguer l'ancien tuyau de pompage. Dans un petit kit plein de flotte nous retrouvons la pompe à pied qui jadis servit à Chouca pour gonfler sa licorne d'exploration aquatique. Le câblage électrique n'a pas bougé, en revanche le sable est revenu en force dans la grande salle, créant ainsi une jolie petite dune.

La crue a également remodelé le cheminement jusqu'au fond, découvrant des blocs et accumulant du sable, sable dans lequel le Président faillit laisser ses bottes.

Nous nous glissons dans la trémie terminale qui abrite la pompe et sommes rapidement arrêtés par l'eau, dix centimètres au dessus de l'IPN. 

La météo n'annonçant pas de précipitations notables avant mi-janvier, le niveau dans la trémie devrait donc continuer à baisser.

Il est 14h50 quand nous ressortons du trou. Le Président me dit qu'il va enfin pouvoir aller fourrer la dinde qu'il n'a pas pu fourrer à Noël. Je lui réponds que je ne veux rien savoir de ses pratiques déviantes afin de conserver intact le mystère de la vie sexuelle des dirigeants d'associations spéléologiques...


Jérôme


25 nov. 2023

Le coup du Lapin

Date : 26 Mars 2023
Participants : Je ne me souviens plus...
TPST : Pas grand-chose

Au printemps dernier, j'avais fait un premier essai avec trois flashs à ampoule chinois dans un puits. Il y en avait un attaché sur la corde tout en haut, un autre sur le model de luxe, et un en bas. La séance a été un peu laborieuse. Nous avons perdu 40% des effectifs avant d'abandonner précipitamment.

Le traitement des photos s'est soldé par un abandon. Et les raws sont tombés dans l'oubli jusqu'à ce que je re-tente l'opération avec du matériel un peu plus moderne et véloce.

Sur trente photos, on va en garder une :

Je suppose que vous aurez reconnu Jérôme sous son meilleur profil. Merci à lui pour les souffrances endurées.

Mathieu

P.S. Au fait, c'est le puits d'entrée de l'Aven du Lapin.


19 nov. 2023

Vestiges anciens et beaujolais nouveau à la Belle Borie

Participants : Bernard, Daniel, François, Jérôme, Mathieu

TPST : 2h30

Notre momie préférée et doyen certifié des spéléologues actifs dans les Alpes-Maritimes est de retour par minou (chat alors !). Le vénérable Bernard (82 piges aux prunes) aussitôt débarqué de sa Charente-Maritime a téléphoné au père François et lui a fait part d'une violente envie de se frotter à de la corde. Notre séminariste perverti ayant compris que l'égrillard vieillard voulait se livrer à des pratiques masturbatoires fétichistes à base de chanvre lui a de fait raccroché au nez : pas de ça au Club ! Il a fallu tout l'entregent du Président Dada pour que le malentendu soit rapidement levé : le Priapique Canonique voulait tout simplement se remettre à la spéléo verticale après de longs mois d'inactivité, et ce dans une cavité peu profonde et sans-trop-d'étroitures-merci. Daniel a ainsi dû farfouiller dans ses fiches pour trouver le trou idéal : l'aven de la Belle Borie, ses 5 puits et ses 53 mètres de profondeur.

Le commando de vieillasses a rendez-vous à 9h30 au parking du GR menant au Plan des Noves, route du Col de Vence. Avec le retour de Bernard, la moyenne d'âge du Club a pris une vieille claque et le GSV penche désormais plus du côté de l'EHPAD souterrain que de l'association sportive culture et jeunesse. Votre serviteur ayant à coeur d'atténuer le caractère gérontologique de la sortie a voulu insuffler un peu de nouveauté en apportant une bouteille de beaujolais... nouveau ! Mathieu fait naturellement la grimace en râlant sur ce pinard chimique fabriqué en un mois et qui attaque impitoyablement le système urinaire et fissure l'anus. Je lui rétorque sèchement que la nouveauté est à ce prix et qu'aujourd'hui nous avons bien besoin de nouveauté au GSV. Le Président coupe court au débat en nous annonçant qu'il y a quarante minutes de marche pour arriver au trou et qu'il faudrait se bouger l'anus justement. Don Francesco ayant depuis peu récupéré le quasi-usage de son genou fait remarquer qu'il avancera moins vite que d'habitude pour s'économiser la rotule. Dada soupire, lève les yeux au ciel, et nous nous ébranlons finalement. 

Le temps est anormalement doux pour un 19 novembre et le ciel irrémédiablement bleu. Il nous faudra presque une petite heure pour atteindre l'aven qui tire son nom d'une jolie borie inachevée plantée à quelques mètres de là. Cette découverte présidentielle est actuellement le plus profond gouffre du Plan des Noves et il est toujours en cours de désobstruction par le Grand Homme. Comme il est équipé de façon permanente, nous descendrons légers, sauf mézigue qui se coltinera le kil de rouge dans un kit rembourré. Il est onze heures lorsque que nous nous introduisons dans le puits d'entrée de 6 mètres. Dada ouvre la marche, je le suis et précède Mathieu qui a pour mission de surveiller les deux vestiges. La descente se fait sans encombres jusqu'à une petite salle sise à moins quinze mètres et dont le magnifique concrétionnement servira de décor à notre déjeuner. Bernard et François nous y rejoignent sans avoir exprimé le moindre reproche : le Président a bien choisi son trou. Pour fêter ça je débouche la fameuse bouteille de pseudo-vin. Finalement, le délicat Mathieu lui trouve quelque agrément alors que François le juge infect. Je le rembarre en lui suggérant de retourner picoler son vin de messe. Le chanoine déviant (comme l'eau) se rebiffe et m'assène que le vin de messe c'est du blanc et pas du rouge. Je vois rouge justement et lui rétorque que Jésus avait du sang rouge aux dernières nouvelles et pas blanc, sinon ce serait du sang de navet. Le fourbe Bernard vient jeter un peu d'huile sur le feu en expliquant que si les curés servent la messe avec du vin blanc c'est pour ne pas se tacher la bure quand ils s'en foutent partout les jours où ils ont un coup dans le nez. Don Francesco crie au blasphème, Mathieu se bidonne et il faut toute l'autorité présidentielle pour ramener la conversation sur des sujets de discussion plus habituels au GSV, à savoir les pratiques sodomites en milieu souterrain et les remontées d'urgence en cas de chiasse incontrôlable. 

Il reste deux puits avant le joli P20 terminal et c'est donc l'esprit clair (la bouteille n'a même pas été finie) et apaisé que notre délégation les dévale. Les deux ancêtres ne feront pas le voyage au fond du puits final, Bernard parce qu'il veut préserver la bête pour cette sortie de reprise, et François parce qu'il réprime depuis l'entrée une formidable envie de débourrer qui nécessite une remontée pas trop tardive. Mathieu et moi toucherons donc le fond (on a l'habitude...), le Président s'arrêtant à mi-puits pour évaluer une possibilité d'exploration d'un conduit latéral prometteur. Tout ce joli monde sort la tête du trou aux alentours de 13h30.

Sur le chemin du retour, Daniel veut nous montrer la centaine de cavités qu'il a ouvertes dans le coin. Nous nous contenterons d'en apercevoir une demi-douzaine car c'est-bien-joli-tout-ça-mais-il-y-a-encore-quarante-cinq-minutes-de-marche-jusqu'aux-voitures.


Jérôme 


L'aven de la Belle Borie filmé par Mathieu lors d'une sortie précédente :




5 nov. 2023

Douche évitée au Zorro

Participants : Daniel, Jérôme, Mathieu

TPST : 3h

Notre ami Mathieu ayant souhaité manger un peu de corde histoire de ne pas perdre la main, Daniel nous propose de retourner visiter l'aven Zorro, sur la commune de Caussols. Rappelons que ce trou découvert par Alain Gomez en 2003 a fait l'objet d'une exploration complète par le GSV à partir de 2008 et qu'il se compose d'une succession de puits et ressauts aboutissant à la cote - 139 au fond d'un puits aveugle. L'objectif de la journée est d'atteindre les moins 115 mètres, juste avant la succession de boyaux et ressauts merdiformes menant au bourbier terminal à 135 mètres de profondeur. Pas de difficultés particulières pour équiper et progresser, si ce n'est un beau P25 "bien arrosé en période pluvieuse" ainsi que le mentionne le guide touristique édité par le CDS06.

Le TSV (Trio Spéléologique de Vence) a rendez-vous au parking de l'aven à 9h30 en ce frais et venteux matin de novembre. Le mistral souffle d'autant plus fort qu'il a copieusement plu les deux derniers jours. Du coup nous nous équipons en deux coups de cuillère à pot et à 10h nous sommes à pied d'oeuvre à l'entrée du trou. Nous allons vite nous réfugier à l'abri de la bise dans le boyau qui mène au premier puits, un P12. Dada équipe tranquillou en s'émerveillant de la solidité des spits de 12 plantés avec amour par son ami Gomez. Après un ressaut de 3 mètres, nous enquillons le long méandre de 30 mètres dont Mathieu me fait remarquer qu'il suinte un petit peu. Ben oui, il a quand même plu pas mal ces jours-ci. Nous enchaînons avec un P18 qui, alimenté en eau par le méandre et quelques fissures deci-delà, commence à éclabousser un chouïa. Le Président, qui comme vous le savez désormais, est particulièrement allergique à l'eau, commence à s'inquiéter : "J'espère que le P25 ne coule pas trop parce que moi je descends pas sous la flotte !". Le seul moyen de savoir c'est d'y aller. Lorsque nous arrivons au bas du P5 suivant, Mathieu constate que l'endroit est suffisamment sec et abrité pour qu'on y casse la croûte et qu'il ne sent pas vraiment un pique-nique au bas du P25 comme nous le faisons habituellement. Nous descendons donc le P13 qui nous conduit à la tête du puits de 25 mètres. Et là, il faut se rendre à l'évidence, le bruit de l'eau qui cascade n'est pas de bon augure. Daniel accroche quand même la corde, espérant aller jusqu'au fractionnement pour évaluer la situation. Même pas. En se penchant un peu il scrute le tube puis nous crie son verdict par-dessus le vacarme de la flotte : "Même pas en rêve ! On fait demi-tour."

Nous voilà donc à déboucher une bouteille de bordeaux dans le P5, comme l'avait prédit Mathieu. Il faut bien cela pour faire oublier au Président toute l'eau qu'il a failli prendre sur la tête. Soyons honnête, je ne me voyais pas non plus sortir trempé du trou pour finir gelé par le mistral du dehors. Finalement Mathieu a quand même eu sa ration de corde jusqu'à la cote - 65. Douche évitée est à moitié pardonnée !

Il est un peu plus de 13h à la montre présidentielle quand nous reposons la grille sur l'aven en nous y donnant rendez-vous lors de la prochaine sècheresse.


Jérôme



22 oct. 2023

Tourisme aux trois mille-pattes

Participants : Aline, Daniel, Jérôme, Mathieu, Océane, Philippe, Sacha, Yannick

TPST : 5h

Aline et Philippe ayant, lors d'une sortie précédente, exprimé leur appétence pour les étroitures et le plat-ventre, le Président a décidé que ce dimanche 22 octobre serait consacré à la visite de la grotte des trois mille-pattes. Cette cavité, découverte par Daniel et explorée par le GSV, est si labyrinthique que sa topographie 3D réalisée par notre ami Christophe ressemble grosso-modo à une boule de poils régurgitée par un chat épileptique. Autrement dit, on ne peut se fier qu'à la mémoire présidentielle pour naviguer dans ce dédale. Nos intermittents de la spéléo ont tous répondu présent à l'invitation, même le jeune Sacha. 

A 8h15 l'équipe est au complet pour attaquer la montée vers le trou qui s'enfonce sous le baou des blancs, avec un développement répertorié de 1500 mètres. Le seul équipement prévu pour chaque convive est une ceinture (qui a dit "de chasteté" ?) avec longe qui permettra de s'assurer lors des passages en vire. A 9h30 la colonne s'insère dans la cavité. Le ton est donné d'emblée : quatrepattage et reptation. Aline et Philippe sont aux anges, Océane, Sacha et Yannick font contre mauvaise fortune bon coeur. Il vaut mieux car les genoux et les fesses seront mis à rude épreuve pour les cinq heures à venir. Ayant visité la grotte dans sa totalité il y a bien des années, je n'avais plus souvenir d'autant de boyaux, de ressauts, de méandres et de petites salles partant dans toutes les directions. Fermant la marche pour ramasser les éventuels retardataires, je me suis retrouvé plus d'une fois égaré avec lesdits retardataires, le Président ayant tendance à tracer tel un furet dans son terrier sans trop regarder derrière lui. De toute cette cavalcade je n'ai finalement retenu que le repas de midi pris dans la jolie salle du Théâtre, avec, au dessert, les toujours appréciées chouquettes-chantilly de notre amie Aline, le tout arrosé d'un bon chenas, d'un café, d'Elixyr de Grande Chartreuse et de Verveine Maléfique du Bon Frère Mathieu.

Lorsque qu'à 14h30 nous nous extirpons du trou, les visages sont marqués car hormis la pause déjeuner, nous n'avons pas chômé côté crapahut. Mention spéciale à Sacha, frais comme un gardon, qui nous confie être tout à fait prêt à y retourner. Ce qui ne semble pas être dans les projets immédiats de son géniteur, le brave Yannick, qui comme moi en a plein les rotules. Nos touristes de l'extrême reconnaissent toutefois que la cavité offre de très belles choses à voir pour qui s'en donne la peine. Je les recompte quand même des fois qu'on en ait oublié un(e) à l'intérieur.

La descente bien raide jusqu'aux voitures finit de nous pulvériser les genoux, dans les cailloux et sous le regard curieux des hiboux.


Jérôme

8 oct. 2023

Sortie familiale à la Baume-qui-remonte et à la Baume Chabert

Participants : Daniel, Hugues, Jérôme, Marion, Nina, Noam, Vincent,
TPST : 5h

La famille Addams étant depuis longtemps partante pour une initiation spéléo, Daniel et votre serviteur nous sommes portés volontaires pour encadrer papa, maman, fifille, petitgars et grand-papa en ce beau et chaud dimanche d'octobre qui ressemble fort à un dimanche de juillet. La Baume-qui-remonte et la Baume Chabert ont été choisies par le Président car susceptibles de plaire à une marmaille (10 ans pour Nina et 6 ans pour Noam) déjà rompue aux exercices endurants de type randonnée et escalade grâce à Marion et Vincent, leurs psychopathes de parents. N'oublions pas grand-papa Hugues qui, sous ses dehors de paisible retraité joueur de PMU, a un très lourd passé d'escaladeur, de varappeur et de traceur de chemins. Tout cela n'est finalement qu'affaire d'atavisme. Les deux cavités, proches l'une de l'autre, présentent aussi l'avantage de proposer aux novices de tous âges des petites salles bien décorées reliées entre elles par d'aimables boyaux. 

Rendez-vous est donc pris à 8h15 au départ du GR menant au Baou des Blancs, sur les hauteurs de Vence. Cette heure matinale nous est imposée à la fois par le confort d'une grimpette à l'ombre jusqu'au plateau et par la nécessité de trouver une place pour les voitures, le lieu grouillant autant de randonneurs que les sièges du métro parisien grouillent de punaises de lit. Nous grimpons sans tarder pour profiter de la fraîcheur et je dois reconnaître que la petite famille dépote côté cadence. Je ferme la marche et je tire la langue comme un vieux clebs. Même Papi Brossard cavale comme une gazelle ! Ces gens-là sont des mutants. 

Ça se calme un peu quand nous basculons de l'autre côté du plateau, là où seul Daniel connaît la trace scabreuse qui mène aux trous. Nous profitons d'une superbe vue sur la mer, Vence et le Baou de Saint-Jeannet.

Il est 9h10 à la montre présidentielle quand nous arrivons à la Baume de l'Oignon à la gauche de laquelle Dada a élargi l'un des trois accès à la Baume-qui-remonte. 



Neuf heures trente sonnent dans le lointain lorsque nous nous enfilons dans la cavité. Quelques mètres de reptation plus loin nous débouchons dans la grande salle du Champignon avec sa belle stalagmite si caractéristique et qui de fait accueillera notre repas de midi. Nous y laissons nos sacs.

Nous partons ensuite à la découverte d'un réseau qui se développe sur 300 mètres et s'étage sur trois niveaux. Pour ne pas effaroucher nos initiés de frais, le Président a décidé de shunter les coins problématiques (essentiellement des étroitures pas très engageantes menant à des culs-des-sac sans intérêt). Nous croisons quelques poignées de chauve-souris, lesquelles font fondre Marion qui n'en avait jamais vu d'aussi près. Daniel nous confie qu'il est censé les compter pour la commission "Chiroptères" du CDS06 mais qu'il n'en a finalement pas envie parce qu'on est dimanche et que le dimanche il a autre chose à faire que de compter des chauve-souris pour satisfaire des écolos chevelus amoureux des rats volants et non-mais-c'est-vrai-quoi.

Je sens que le Grand Homme s'échauffe un peu, aussi je l'invite délicatement à poursuivre la visite avec, au bout, la perspective d'une bonne bouteille de rouge. Nina et Noam furètent dans tous les coins tandis que leur père, Vincent, se prend d'une passion subite pour les chatières. Le garçon aime le challenge et de voir notre vieux Président se faufiler comme une anguille au milieu des concrétions chatouille quelque peu son amour-propre de quarantenaire sportif. 


Il s'en tire plutôt bien et Dada lui dit que s'il aime vraiment les étroitures, il en a un plein wagon à sa disposition dans de nombreux trous du département. Grand-Papa ne démérite pas mais me chuchote qu'il n'a pas la condition de son gendre pour aller faire l'andouille dans des boyaux aussi riquiquis. Je le rassure en lui confiant que c'est tout à fait normal et qu'au GSV les seuls goulots d'étranglement qu'on apprécie sont ceux qu'on trouve au sommet des bouteilles...

Et à propos de bouteille, il est quasiment 11h30 quand nous revenons à la salle du Champignon. C'est l'heure de l'apéro et j'exhibe donc un petit vin de l'Aveyron (et oui, ils font aussi du vin là-bas) qui excite notre curiosité : piquette ? Nectar ? Il n'existe qu'un moyen de trancher. Accompagné de quelques chips et d'un excellent pâté maison concocté par les parents de Vincent, le picrate s'avère finalement fort agréable et même un peu sournois, preuve en est la titubation de Marion qui s'était relevée pour mieux se rasseoir. C'est tout simplement l'ivresse des profondeurs. Et un seul verre suffit.

Le café avalé, nous sondons l'état de forme des pitchounets qui sont tout prêts à redécoller. Papi requinqué au gros rouge est également d'attaque, aussi ressortons-nous de la Baume-qui-remonte pour aller explorer la Baume Chabert, une centaine de mètres plus loin. 

Même concept : des petites salles décorées et plusieurs entrées. Le Président ayant jonctionné la cavité avec l'abri C9, un ancien gisement archéologique, cela nous permet d'aller tripoter quelques nonosses et bouts de poterie pour le plus grand plaisir des mômes. Grand-Papa, qui fut dentiste dans une vie antérieure, s'interroge quand même sur l'origine humaine d'un mandibule aux dents bien trop usées. 

Ça rampe pas mal, ça grimpe, ça descend et ça gadouille un poil, histoire qu'on ne ressorte pas tout propres comme les premiers blaireaux venus. 




Finalement nous sortons par l'entrée originelle du trou qui ressemble justement à un terrier de blaireau. Grand-papa et moi nous extirpons les premiers pendant que le reste de la petite famille suit Dada dans un cul-de-sac bien étroit. Si étroit et farci de concrétions que même Vincent, notre récent addict aux étroitures, renonce de peur de faire un carnage parmi les stalagmites.

Il est 14h30 et nous avons fait le tour de la question. Il est temps de remettre leur diplôme de nouveaux initiés à Noam et Nina, diplôme qui prend la forme d'une grosse sucette. 

Grand-papa en veut une aussi, mais Marion le tance : "Papa, voyons, tu as passé l'âge de sucer !". Sur ces considérations familiales, nous nous changeons et attaquons la remontée vers le plateau. 


Jérôme

(avec les photos de Hugues)


Les deux grottes lors de sorties précédentes :